Les omégas 3
- F.Walther
- 14 juil.
- 6 min de lecture
Article santé en partenariat entre la Docteure Vétérinaire Eléonore Canitrot (oui c’est son vrai nom !) et Fanny Walther d’AREG Animalcare.
Soucieuses de vulgariser un maximum de données concernant la santé animale et notamment canine, voici un premier article sur la complémentation en Oméga 3.
Omega 3

1. Définition
Les oméga-3 sont des acides gras essentiels : les mammifères ne peuvent pas les synthétiser eux-mêmes. Ils doivent donc être apportés par l’alimentation.
On distingue trois sources principales :
ALA (acide alpha-linolénique) : d’origine végétale, présent dans le lin, le colza, le soja, les noix.
EPA (acide eicosapentaénoïque) et DHA (acide docosahexaénoïque) : d’origine marine, retrouvés dans les poissons gras (saumon, maquereau, sardine, thon, anchois) et le krill.
2. Rôles et intérêts physiologiques des oméga-3
Les oméga-3 ont de nombreux effets bénéfiques, notamment :
Effet anti-inflammatoire général : ils orientent le métabolisme vers un état anti-inflammatoire, à l’opposé des oméga-6.
Soutien de la fonction locomotrice : particulièrement utile en cas d’arthrose.
Effet bénéfique sur les troubles dermatologiques : amélioration de la qualité cutanée et du pelage.
Soutien dans l’épilepsie essentielle : certains effets neuroprotecteurs sont observés.
Effet anti-tumoral (en complément de traitements classiques).
Régulation de la lipémie : réduction des triglycérides et du cholestérol.
Action sur les récepteurs et canaux ioniques : notamment au niveau rénal et nerveux.
3. Formes disponibles et biodisponibilité
3.1 Problème des oméga-3 végétaux chez le chien
Les sources végétales (lin, colza, chia, noix...) apportent majoritairement de l’ALA. Or, cet ALA doit être converti en EPA et DHA, les formes réellement actives biologiquement.
Cette conversion est très inefficace chez les chiens :
Conversion enzymatique | Efficacité approximative |
ALA → EPA | 10–15 % |
ALA → DHA | 1–5 % (voire <1 %) |
Conséquence : pour obtenir 100 mg d’EPA/DHA, il faudrait plusieurs grammes d’ALA. Cela rend les huiles végétales inadaptées en usage thérapeutique.
3.2 Tableau comparatif des sources
Source | Oméga-3 principal | Conversion EPA/DHA | Intérêt clinique |
Huile de lin / colza | ALA | Très faible (5–10 %) | Faible |
Huile de poisson | EPA + DHA | Actifs directement | Élevé |
Huile de krill | EPA + DHA | Actifs + antioxydants | Élevé |
Microalgues (Schizochytrium) | DHA/EPA actifs | Bonne assimilation | Bon substitut végétal |
4. Focus : L’huile de krill
L’huile de krill est riche en EPA/DHA présents au sein de phospholipides comme les glycérophospholides (glycérol combiné à deux acides gras et un groupement phosphate : cf schéma) et contient de l’astaxanthine, un antioxydant très puissant, supérieur au bêta-carotène.

Bénéfices de l’astaxanthine :
Protège contre le stress oxydatif et le vieillissement cellulaire.
Renforce le système immunitaire et cardiovasculaire.
Améliore l’élasticité et l’hydratation cutanée.
Protège contre les effets des UV (sans se substituer à une protection solaire).
Ralentit la dégénérescence maculaire liée à l’âge.
Points faibles du krill :
Faible concentration en oméga-3 par capsule → il en faut beaucoup pour atteindre une dose thérapeutique chez un chien.
Prix élevé pour un effet équivalent à d'autres huiles de poisson concentrées (EPAX, par exemple).
Source animale peu durable à très grande échelle, si non certifiée (MSC, etc.).
5. Posologie
Traitement (arthrose, inflammation...) :150 mg/kg/jour Exemple : chien de 20 kg → 3 000 mg/jour (3 g)
Entretien (prévention, peau, cognition) :45 mg/kg/jour minimum Exemple : chien de 20 kg → 900 mg/jour
Limite maximale de sécurité :2800 mg/Mcal, soit environ 370 mg/kg/jour chez le chien.
6. Effets secondaires potentiels
Les effets indésirables peuvent inclure :
Troubles de la coagulation
Troubles digestifs
Ralentissement de la cicatrisation
Risque d’oxydation des graisses (stress oxydatif)
Exposition aux métaux lourds (si produit non purifié)
Perturbations de la glycémie
Interaction médicamenteuse possible
Remarque : Ces effets sont dose-dépendants.
7. Comparatif des produits disponibles
Produit / Marque | Oméga‑3/capsule | EPA / DHA (mg) | Forme / Certification | Prix (indicatif) | Capsules/jour (20 kg) | EPAX ✔︎ |
Miloa Oméga Supp | 600 mg | 350 / 250 | Huile de poisson | 50 € / 60 capsules | 5 | ❌ |
Omega 3 90% | 900 mg | 460 / 380 | Concentré + tocophérol | 14 € / 28 capsules | 3–4 | ❌ |
Krill – Nourrir comme la nature | 115 mg | 57 / 30 | Huile de krill | 29,90 € / 100 capsules | 26 | ❌ |
European Pet Pharmacy | 550 mg | 330 / 220 | Huile de sardines/anchois | 27 € / 180 capsules | 6 | ❌ |
Sardines fraîches (100 g) | 2–3 g | Variable | Produit brut | 3,40 €/kg | ~100 g/j | ❌ |
Element Vet – Huile de krill | 115–120 mg | 50 / 27,5 | Huile + astaxanthine (MSC) | 32,50 € / 120 capsules | 20–26 | ❌ |
Nutripure Oméga-3 EPAX | 1 000 mg | 420 / 300 | Huile EPAX certifiée (rTG) | 33 € / 90 capsules | 3 | ✅ |
8. Conditionnement : quel format choisir ?
Forme | Avantages | Inconvénients |
Huile | Naturelle, dosage souple | Oxydation rapide, extraction dénaturante |
Capsule | Stable, protection contre oxydation | Gélatine parfois présente |
Produit frais | Très riche, biodisponible | Variabilité saisonnière, conservation |
Poudre | Facile à intégrer à la ration | Perte à la cuisson, oxydation à l’air |
9. Recommandations pratiques
Origine - Fabrication - Conservation - Dosage & Prix, ne faites pas l'impasse !
Conservez toujours les oméga-3 au réfrigérateur, surtout après ouverture (mais même pour stockage), pour éviter l’oxydation.
Préférez les produits certifiés EPAX pour des omégas 3 d'origine poisson : garantie de pureté, faible teneur en métaux lourds et oxydation contrôlée. Ou krill (plus onéreuse mais supposément plus efficace)
A partir de quand ?
La supplémentation en oméga-3 peut (et devrait) commencer très tôt dans la vie du chien.
Dès que les chiots passent à une alimentation solide, on peut introduire des oméga-3 sous une forme adaptée. Avant cela, ils en bénéficient naturellement via le lait maternel, à condition que la mère elle-même soit complémentée pendant la gestation et la lactation.
Pourquoi commencer aussi tôt ?
Développement cérébral et oculaire : le DHA est un composant essentiel du cerveau et de la rétine. Un apport suffisant en DHA durant les premières semaines de vie est crucial pour le bon développement neurologique et sensoriel.
Mise en place du système immunitaire : les oméga-3 soutiennent la régulation de l'inflammation et favorisent une réponse immunitaire plus équilibrée.
Croissance articulaire et osseuse : l’EPA et le DHA contribuent à limiter les inflammations liées à la croissance rapide, en particulier chez les races moyennes à grandes.
Entre 5 et 8 mois, lors du pic de croissance, j’augmente personnellement les doses : c’est une période où les articulations sont soumises à de fortes contraintes mécaniques, parfois supérieures aux capacités d’adaptation tissulaire.Ensuite, une fois la phase de croissance majeure passée, la dose peut être ajustée en entretien.
Posologie chez le chiot
Les besoins sont les mêmes en mg/kg/jour que chez l’adulte, mais il faut rester vigilant sur la tolérance digestive.
En cure ou continu ?
Administration en continu (plutôt que par cure) est recommandée dans la majorité des cas, notamment pour :
Arthrose chronique (effet anti-inflammatoire à maintenir)
Maladies dermatologiques récidivantes (atopie, sécheresse cutanée)
Prévention cognitive / vieillissement
Support cardio-vasculaire ou rénal
Épilepsie idiopathique
Les bénéfices des oméga-3 apparaissent progressivement sur plusieurs semaines, et leur effet retombe rapidement à l’arrêt. Il est donc contre-productif de faire des “cures courtes” dans les situations pathologiques chroniques.
Exception : cures ponctuelles
Des cures peuvent être envisagées dans les cas suivants :
Chute saisonnière du poil
Inflammation temporaire (ex. : récupération post-chirurgicale)
Renforcement immunitaire ponctuel (ex. : convalescence)
Durée typique : 4 à 8 semaines, à adapter selon l’effet recherché.
12. Et l’alimentation ? Que faire si les croquettes contiennent déjà des oméga-3 ?
Oui, cela dépend fortement du régime alimentaire :
Les croquettes contiennent souvent des oméga-3, mais...
En quantité faible, car l’ajout coûte cher aux fabricants.
En qualité variable : souvent ALA (végétal) plutôt que EPA/DHA.
Surtout : les oméga-3 s’oxydent très rapidement dans les croquettes (exposées à l’air, à la lumière, à la chaleur).
L’oxydation dans les croquettes est un problème majeur :
Même si des oméga-3 (EPA/DHA) ont été ajoutés, ils peuvent être dégradés dès la fabrication ou au cours du stockage.
Sauf si les croquettes sont enrichies en post-extrusion + protégées par de puissants antioxydants naturels (tocophérols, astaxanthine), les taux réels peuvent être nettement inférieurs à ceux annoncés.
13- Conclusion ...
Complémentez. !!!!!!
Potential Adverse Effects of Omega-3 Fatty Acids in Dogs and Cats
C.E. Lenox and J.E. Bauer, J Vet Intern Med 2013
Acides gras et arthrose : différents types, différents effets
Author links open overlay panelMarieke Loef a, Jan W. Schoones b, Margreet Kloppenburg a c, Andreea Ioan-Facsinay
Dr Vétérinaire Eléonore Canitrot - Fanny Walther OA471
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